jeudi 2 juin 2011

LA RETRAITE – EXPÉRIENCE D’UN AN

Certains l’attendent avec impatience, leur travail n'ayant été qu'une façon de gagner leur vie, ayant été insatisfait professionnellement durant toute ou une bonne partie de leur carrière. D'autres sont aussi impatients de prendre leur retraite car ils ont regardé leur guitare, leur piano, leur ciseau à bois, leur carte du monde, etc...pendant de longues années, attendant le moment de consacrer plus de temps à leur passion.
Beaucoup d'autres la craignent, même ceux qui n'ont pas été heureux au travail. Ils ont certes hâte de faire ce qu'ils veulent, mais, s'ils n'ont pas de véritable passion ou de projet en réserve, ils se demandent eux-mêmes ce qu’ils veulent véritablement faire. Comment occuper une vie par d'autre chose, ayant passé entre 40 et 50 heures de travail par semaine, depuis presque 38 ans et consacré le reste du temps aux enfants et à la conjointe?
Certains ont le temps de la préparer et d’autres se retrouvent dans une situation où la décision de la prendre doit être rapide. Mais peut-on véritablement se préparer à la retraite ?
Je  n’ai pas pris de cours de « préparation à la retraite » et  je n’ai pas lu une ligne sur le sujet. Mes amis me disent que le contenu principal des cours de  « préparation à la retraite » porte essentiellement sur les préparatifs financiers et juridiques de la retraite. Alors la question fondamentale est : « Mais avec quoi vais-je remplacer toutes ces heures où je n’avais pas à me poser la question : mais que vais-je faire avec mon temps aujourd’hui ? » On se posait souvent la question  « mais que vais-je faire aujourd’hui?» La réponse venait rapidement après avoir jonglé entre ses responsabilités professionnelles, familiales et personnelles. Il suffisait de partager les heures de la journée entre ces trois catégories.
J’ai pris la décision de cesser de travailler le 16 mars 2010. J’ai pris cette décision de façon impulsive et pour des raisons personnelles. Le 15 je travaillais et je n’escomptais pas cesser de travailler avant décembre 2011. Le 16, je décidais de mettre fin au contrat qui me liait avec le client pour lequel je travaillais à l’époque. Quelques jours plus tard, je décidais de ne pas répondre à des nouveaux appels d’offre de services. J’ai décidé d’utiliser cette période pour "tester la température de l’eau" de l'océan inconnu qu'on nomme la retraite.
Les 6 premiers mois, ce sont des vacances prolongées. On vit un genre d’exaltation de ne plus avoir de préoccupations de nature professionnelle durant une période aussi longue. Si on décide de ne rien faire, on ne se sent pas coupable et on jouit pleinement de notre capacité à pouvoir le faire, cette occasion ne s’étant jamais présentée au cours des 38 dernières années. En effet, même en vacances, on se programme des activités car les vacances ne peuvent évidemment pas être utilisées à ne rien faire !!
Mais l’automne arrive et tout le monde retourne au travail. Il fait moins beau, souvent il pleut. On se lève, on déjeune, et on prend 1 ½ heures pour lire son journal. Pas d’activités spéciales prévues pour la journée. On tourne en rond dans la maison. On prend une marche quand même, on fait quelques courses, on répond à ses courriels, on va s’entraîner ou faire une autre activité sportive quelconque, etc…On se sent quand même heureux, mais graduellement s’installe une sorte de « blues » de la retraite où on devient ambivalent face à tout ce temps libre. S’installe aussi le « manque » de valorisation qu’apportait le réseau professionnel. On n'est plus d’autre personne que soi-même, et on est seul, même si on est en couple, car l'autre fait ses affaires.
C’est là que commence à se vivre véritablement la retraite. Comment diminuer cette quasi angoisse du temps à remplir avec des activités qui vont nous apporter une valorisation personnelle? Il ne faut plus compter sur les autres pour nous dire qu'on est bon et qu'on travaille bien. C’est pourquoi plusieurs  retraités se jettent dès le début de leur retraite dans des activités organisées, font du bénévolat, suivent des cours, etc… Ils comblent cette « angoisse » du temps à occuper, et cette relative solitude, par des activités qu’ils croient, vont les intéresser.
Je crois que cette stratégie de toujours meubler le temps, sans aller au bout de l’angoisse que cause l’absence de projet valorisant pour l’occuper, empêche les personnes de véritablement faire ce qui les valoriserait le plus. C'est au bout de cette angoisse qu'émergent les idées de nouveaux projets qui meubleront notre temps de façon à ce que nous continuions de croître personnellement. Si on comble systématiquement  les périodes de temps inoccupées par des projets, pour diminuer l’angoisse que procure la « non activité », on manque de bonnes occasions de laisser émerger ce qu'on voudrait véritablement faire avec le reste de notre vie.
Ma conjointe m’a dit un jour, elle qui est à la retraite depuis maintenant 10 ans : « À chaque jour, il faut faire quelque chose pour son cœur, quelque chose pour son corps, et quelque chose pour son âme », « âme » étant interprété comme quelque chose de spirituel ou d'intellectuel.
C’est donc en laissant s’installer progressivement cette angoisse durant quelques mois que me sont apparues les projets d’écriture et la redécouverte de la lecture des biographies des grands personnages et des grands auteurs.  Dans le fond, c'est en quelque sorte en continuité avec mon travail professionnel antérieur!  Réfléchir, c’était l’activité que j’aimais le plus et ce qui me valorisait le plus, lorsque j'en avais le temps! Réfléchir, pour bien comprendre et analyser les nombreux enjeux auxquels j'avais à faire face, et l'écriture, pour bien décrire et faire comprendre ces enjeux aux personnes concernées.
Mes nouveaux sujets de réflexion n'ont plus pour origine des enjeux de nature professionnelle, et mon écriture est maintenant la résultante de ces réflexions. Je trouve particulièrement intéressant de travailler à chercher le bon mot pour bien décrire le sujet, le verbe ou le complément!!. J'ai encore beaucoup à faire, je le sais!! J'aurais dû mieux écouter mes professeurs et mieux travailler lors de mes années au collège classique! Et de vous savoir là, à lire et quelquefois à commenter mes opinion et réflexions, c'est ma valorisation.
L'angoisse a baissé, mais son traitement est une bataille quotidienne, lorsqu'il n'y a pas de projets qui déterminent les activités de la journée (comme un voyage par exemple). Je persiste à croire que la voie que je vous ai décrite comblera le temps du retraité qui ne peut compter sur une passion déjà existante, de façon plus valorisante. Je vous tiendrai au courant de la suite des choses….ma retraite étant quand même relativement récente!.

1 commentaire:

  1. Merci pour ces mots qui me parlent beaucoup à la veille de ma retraite et de l'angoisse du temps libre ( ? ) que je sens poindre. Francoise dt

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