samedi 10 janvier 2015

LA TUERIE DE PARIS - LETTRE À MES AMIS FRANÇAIS

LA TUERIE DE PARIS - LETTRE À MES AMIS FRANÇAIS

J’ai longtemps hésité avant de vous écrire cette lettre, car je me questionnais sur les raisons pour 
lesquelles les deux sentiments qui m'animent à l'heure actuelle  depuis bientôt 4 jours sont à 
l’opposé l’un de l’autre : la tristesse et l’envie. Comment réussir à les réconcilier?
Je suis triste parce que vous avez collectivement vécu quelque chose d’effroyable. 
J’ai éprouvé cette tension de l’autre côté de l’océan et j’ai peine à imaginer comment elle se vivait 
à Paris et dans les villes et villages qui ont servis de théâtre aux évènements. Je suis triste parce que j’ai perdu la foi dans l'existence de limites à la barbarie.
Je suis en même temps envieux parce que spontanément, vous avez eu le courage, non seulement
de réaffirmer les valeurs qui ont servi au fondement de votre République, mais vous attestez, par votre comportement, qu’elles sont fondamentales au maintien de la qualité de vie que nous prenons maintenant pour acquis. Spontanément, vous avez publié de nouveau les caricatures qui ont été la source de ce fanatisme éhonté, et vous les avez apportées avec vous dans vos manifestations de support à une presse libre, base de toutes les démocraties qui se veulent dignes de ce nom.  En passant, seuls les journaux québécois ont publié quelques-unes des images de Charlie Hebdo caricaturant Mahomet. Aucun des journaux canadiens-anglais et américains ne l’a fait !
À cause de ces évènements, je me suis longuement questionné sur la pertinence de faire paraître, 
par exemple, le numéro spécial sur la Charria. En le publiant, les journalistes et les éditeurs de Charlie Hebdo savaient pertinemment qu’ils mettaient leur propre vie en danger ; mais je songeais qu’ils mettaient aussi en péril la vie de tout le personnel diplomatique français qui travaille à l’extérieur du pays, de tous les Français qui voyagent à l’étranger et maintenant, de tous les Français sur leur propre territoire. Pourquoi donc, peut-on se permettre de publier des dessins dont on sait pertinemment qu’ils vont être la cause du décès d’un ou de plusieurs de nos compatriotes?  
J’en suis arrivé à la conclusion que les fanatiques qui ont sauvagement assassiné les 16 journalistes, policiers et otages auraient certainement trouvé d’autres raisons pour justifier leur soif de tuer les non-croyants que nous sommes. La seule façon de se moquer de ce radicalisme religieux prêchant un fanatisme outrancier est de continuer à défendre les valeurs qui définissent la société dans laquelle nous voulons continuer de vivre. 
Je vous offre donc mes plus sincères condoléances à l’occasion de ces évènements tragiques, mais aussi toute mon admiration devant votre résilience.
Je souhaite que notre société canadienne prenne acte de votre soutien indéfectible aux valeurs que 
vous défendez envers et contre tous.
Au plaisir de vous revoir la semaine prochaine.


Claude

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