samedi 27 avril 2013

LE SOLEIL DES SCORTA de Laurent Gaudé - prix Goncourt 2004


LE SOLEIL DES SCORTA de Laurent Gaudé - prix Goncourt 2004

Au début du mois d’avril, je vous présentais un auteur que j’ai découvert par hasard, en « fouinant » à la bibliothèque municipale. Je vous parlais de Laurent Gaudé et de l’impression très positive que m’a fait laissée la lecture de son livre : « Les Portes de l’Enfer ». Je vous mentionnais que je m’empresserais de lire le volume qui lui a valu le prix Goncourt en 2004 : « Le Soleil des Scorta ». Eh bien je l’ai lu et quel autre plaisir de lecture j’ai ressenti en prenant connaissance d’un tel chef d’œuvre de précision chirurgicale dans l’utilisation des mots. Je vous lis les premières phrases :
« La chaleur du soleil semblait fendre la terre. Pas un souffle de vent ne faisait frémir les oliviers. Tout était immobile. Le parfum des collines s’était évanoui. La pierre gémissait de chaleur. Le mois d’août pesait sur le massif du Gargano avec l’assurance d’un seigneur. Il était impossible de croire qu’en ces terres, un jour, il avait pu pleuvoir….. »
On a chaud rien qu’à lire des quelques lignes ; on sue quasiment !! On sait que le livre va se dérouler dans un territoire hostile. Les personnages ne nous sont pas encore présentés et on sait d’avance qu’ils vont avoir chaud et qu’ils vont avoir de la difficulté à vivre dans un tel climat. Quelle belle écriture.

Voici un autre échantillon, vers le milieu du livre:
« Depuis un mois, le soleil tape. Il était impossible que tu partes. Lorsque le soleil règne dans le ciel, à faire claquer les pierres, il n’y a rien à faire. Nous l’aimons trop cette terre. Elle n’offre rien, elle est plus pauvre que nous, mais lorsque le soleil la chauffe, aucun d’entre nous ne peut la quitter. Nous sommes nés du soleil, Élia. Sa chaleur, nous l’avons en nous. D’aussi loin que nos corps se souviennent, il était là, réchauffant nos peaux de nourrissons. Et nous ne cessons de le manger, de le croquer à pleines dents. Il est là, dans les fruits que nous mangeons. Les pêches. Les olives. Les oranges. C’est son parfum. Avec l’huile que nous buvons, il coule dans nos gorges. Il est en nous. Nous sommes les mangeurs du soleil…. »
On voit bien que même si le livre est l’histoire de quatre générations de Scorta dans les Pouilles, le personnage principal, celui qui va influencer tous les autres, c’est le Soleil. Il est toujours présent dans le livre. C’est à se demander s’il fait mieux vivre en hiver que dans un tel climat !!. À remarquer aussi la ponctuation : « Il est là, dans les fruits que nous mangeons. Les pêches. Les olives. Les oranges. C’est son parfum. » Au lieu de la virgule entre chaque fruit, comme presque tout le monde aurait fait, il met un point, pour nous permettre de faire un temps d’arrêt et de  presque gouter aux fruits qu’on imagine juteux.
Roman agréable, bien structuré, concis, qui fait travailler l’imagination. Très beau prix Goncourt. On sait maintenant pourquoi. Dommage qu’ils ne soient pas tous comme lui !

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